Fiscalité / Successions et donations à l’international

Ces transmissions aux problématiques non résolues

Xavier Rohmer, avocat associé et Emilie Lecomte, avocat senior chez August Debouzy August Debouzy
Sur le plan fiscal, la réalisation de donations et successions hors de France est de nature à poser des difficultés
Des exemples permettent de les appréhender tandis que plus de 14 millions de ressortissants de l’Union ne vivent pas dans leur Etat d’origine
DR, Xavier Rohmer, avocat associé, et Emilie Lecomte, avocat senior, August Debouzy

Le traitement fiscal des donations ou successions internationales ayant donné lieu à peu de développements dans la jurisprudence ou en doctrine, le présent article a pour objectif de mettre en lumière quelques difficultés pratiques auxquelles les praticiens peuvent être confrontés dès lors qu’un lien d’extranéité existe dans le cadre d’une succession ou d’une donation.

Cet éclairage permettra non seulement d’alléger le montant des droits de mutation à titre gratuit (DMTG) qui seraient dus par les bénéficiaires, mais aussi d’anticiper les problèmes qu’ils devront régler dans le délai de dépôt de la déclaration de succession (six mois si le décès a lieu en France métropolitaine, un an dans le cas contraire ) (1).

RISQUE DE REMISE EN CAUSE POTENTIELLE DE LA QUALITÉ DE NON-RÉSIDENT FISCAL DU DÉFUNT-DONATEUR

Ce sujet fait l’objet de peu de commentaires et n’a jamais été spécifiquement tranché par la jurisprudence alors qu’il s’agit d’un enjeu majeur pour le traitement fiscal en France des successions ou donations internationales : quelles règles de résidence sont alors applicables ?

La notion de domicile fiscal.

La notion de « domicile fiscal » (ou « résidence ») est au centre des règles de territorialité du droit interne français en matière de DMTG, prévues à l’article 750 ter du Code général des impôts (CGI). Ce texte prévoit l’assujettissement aux DMTG : (i) de tous les biens français et étrangers lorsque le donateur ou le défunt a son domicile fiscal en France, (ii) de tous les biens français lorsque le donateur ou le défunt n’a pas son domicile fiscal en France et que l’héritier ou donataire n’a pas son domicile fiscal en France au jour de la mutation ou ne l’a pas eu pendant au moins six ans au cours des dix dernières années précédant celle-ci, (iii) de tous les biens français ou étrangers transmis par une personne domiciliée hors de France à un bénéficiaire domicilié en France pendant au moins six ans au cours des dix années précédant la mutation.

Critères prévus par l’article 4 B du CGI.

S’agissant de la localisation du domicile fiscal en France ou hors de France pour l’application des dispositions précitées, le dispositif de l’article 750 ter du CGI renvoie aux critères de l’article 4B du CGI, c’est-à-dire aux règles de domiciliation applicables pour l’impôt sur le revenu (« IR ») (et par renvoi, pour l’ISF) (2). Selon ces dispositions, une personne est considérée comme ayant son domicile fiscal en France lorsqu’elle remplit au moins un des critères alternatifs suivants : (i) avoir son foyer en France ou à défaut, le lieu de son séjour principal, (ii) exercer son activité professionnelle principale en France, ou (iii) avoir en France le centre de ses intérêts économiques.

Conflits potentiels de résidence fiscale, résolus par les conventions fiscales.

En présence d’un élément d’extranéité, la plupart des conventions fiscales contiennent une règle de conflit, permettant de déterminer la résidence fiscale d’une personne lorsque chacun des deux Etats parties à ladite convention la considère comme résident fiscal en vertu des règles de son droit interne. Bien entendu, le résultat du test de résidence conventionnelle primera sur celui de la règle de droit interne. De manière générale, lorsque la règle de conflit en matière de résidence fiscale reprend celle prévue par le modèle de convention OCDE (c’est à dire dans la plupart des conventions fiscales conclues par la France) l’Etat de résidence sera déterminé selon l’application des critères successifs, du (i) lieu du foyer d’habitation permanent, (ii) du lieu du centre des intérêts vitaux, (iii) du lieu du séjour principal et enfin de (iv) l’Etat dont l’intéressé a la nationalité.

En l’absence de convention fiscale internationale.

Cela étant, la France a conclu peu de conventions fiscales en matière de droits de donation et/ou de succession (une quarantaine environ), à l’inverse du nombre important de conventions conclues en matière d’IR. Ainsi, en cas de conflit de résidence entre la France et un Etat étranger lié à celle-ci par une convention fiscale en matière d’IR mais pas en matière de droits de donation et ou succession, on peut s’interroger sur la possibilité de recourir à la règle de conflit en matière de résidence fiscale prévue par cette convention en matière d’IR pour déterminer la résidence fiscale de la personne en question pour l’application des règles de territorialité françaises en matière de DMTG. En effet, en matière d’ISF, selon la doctrine de l’administration, lorsqu’il existe une convention fiscale en matière d’IR qui ne contient aucune disposition en matière d’ISF, il convient d’apprécier la résidence fiscale pour l’application des règles de territorialité de cet impôt, non pas sur le fondement des seuls critères du droit interne mais en application des critères conventionnels (BOI-PAT-ISF-20-20 n°20 et 50).

Absence de tolérance administrative en matière de DMTG.

Mais cette tolérance administrative n’existe bizarrement pas en matière de DMTG. Dès lors, en pratique, en l’absence de position de l’administration fiscale ou de la jurisprudence, une interprétation stricte des dispositions légales et conventionnelles doit être effectuée : en présence d’une convention fiscale en matière de succession ou de donation, la résidence fiscale devrait s’apprécier au regard des critères conventionnels, mais en l’absence d’une telle convention, seuls les critères de domiciliation fiscale prévus par le droit interne doivent être pris en compte pour appliquer les règles de territorialité prévues par l’article 750 ter du CGI, peu important qu’il existe une convention fiscale applicable en matière d’IR ou d’ISF. Cette solution repose sur l’analyse stricte des conventions fiscales qui ne peuvent être invoquées que pour les impositions qu’elles visent spécifiquement.

Cette solution peut conduire à des situations où une personne physique peut être considérée à la fois comme non-résidente de France pour l’imposition de ses revenus et de sa fortune en application d’une convention fiscale conclue en ces matières par la France mais comme résidente fiscale française pour les donations ou successions qu’elle peut recevoir ou avoir consenties.

Exemple 1 : Prenons le cas d’une personne qui transfère sa résidence fiscale de France vers Israël, Etat qui est lié à la France par une convention fiscale sur les revenus et sur la fortune, mais n’ayant pas conclu de convention en matière de DMTG. Cette personne conserve la majeure partie de son patrimoine en France mais a renoncé à la libre disposition de toute habitation en France et s’abstient complètement de séjourner en France depuis son départ. La règle de conflit de résidence (article 4) de la convention fiscale franco-israélienne tranchera sans nul doute en faveur d’Israël : cette personne sera considérée comme résidente d’Israël (à condition d’être considérée comme résidente fiscale israélienne par le droit interne israélien en premier chef) dans la mesure où elle n’aura pas de foyer d’habitation permanent en France et ce, quelle que soit l’importance de son patrimoine français. Cette solution s’appliquera tant en matière d’IR que pour son assujettissement à l’ISF en France. Pour ces deux types d’impositions, la France considérera cette personne comme non-résidente.

Cependant, si plusieurs années après son transfert de résidence, elle consent une donation de biens situés en Israël à ses bénéficiaires résidant de cet Etat, l’administration française serait en droit d’imposer cette donation en considérant que la détermination de la résidence fiscale selon la convention fiscale franco-israélienne n’est pas applicable en matière de DMTG et que cette personne a conservé son domicile fiscal en France au sens de l’article 4B du CGI puisqu’elle a continué d’y avoir la plupart de ses actifs productifs de revenus (critère du centre des intérêts économiques).

Dès lors, en l’absence de convention fiscale spécifiquement applicable en matière de DMTG (ou dans le cas où ladite convention serait dénoncée…), cette donation, bien que portant sur des biens étrangers et réalisée au profit de résidents étrangers, pourrait être soumise aux droits de donation français puisqu’elle serait réputée consentie par une personne domiciliée en France au sens de l’article 4B du CGI.

QUALIFICATION FISCALE D’UNE DÉTENTION DE BIENS IMMOBILIERS EN FRANCE EN MATIÈRE DE DROITS DE DONATION OU DE SUCCESSION

Une autre question récurrente en matière d’application de DMTG concerne l’assujettissement de la transmission de biens immobiliers français détenus par des non-résidents. Dès lors, comment les non-résidents doivent-ils structurer leur patrimoine immobilier en France ? Acheter via une société française ou étrangère ? Avec quel impact en cas de transmission ?

Une définition large des biens immobiliers en droit fiscal français.

En vertu de l’article 750 ter du CGI, outre (i) les immeubles français, vont également être assimilés à des biens français, (ii) les titres de sociétés à prépondérance immobilière en France, c’est-à-dire les sociétés françaises ou étrangères dont plus de la moitié de l’actif est composée de biens ou de droits immobiliers français non affectés à la propre activité, autre que civile, de cette société ou de parts de sociétés répondant elles-mêmes à cette qualification. De même, cet article permet d’imposer comme des immeubles français, (iii) les biens ou droits immobiliers français détenus directement ou indirectement via une société française ou étrangère contrôlée à plus de 50% par le non-résident et son groupe familial. Toutefois, les quelques conventions fiscales conclues par la France en matière de donation ou de succession peuvent restreindre l’application de ces dispositions de droit interne (en particulier l’hypothèse d’imposition de la détention indirecte d’un bien ou droit immobilier français via une société contrôlée à plus de 50 % mais non qualifiée de société à prépondérance immobilière).

Ainsi, la détention directe d’un immeuble français par une personne non-résidente sera quasiment systématiquement soumise aux DMTG en France. Il en serait de même à propos d’une société française ou étrangère spécifiquement constituée pour acquérir l’immeuble, sauf à bénéficier d’une convention fiscale conclue entre la France et l’Etat du propriétaire n’assimilant pas les titres de sociétés à prépondérance immobilière à des immeubles.

Quid de la détention du bien immobilier par la société étrangère ?

Toutefois, la détention du bien immobilier par une société étrangère plutôt que par une société française peut influer sur le montant final des droits de succession ou de donation en France.

En effet, si le bien immobilier français est acquis via une société française détenue par un non-résident, les parts de cette dernière constituent des biens français en vertu des règles de territorialité applicables en matière de DMTG et sont, par principe, imposables en France pour l’intégralité de leur valeur vénale (le fait que la société soit à prépondérance immobilière ou non étant indifférent ici).

En revanche, si le bien immobilier est acquis via une société étrangère détenue par un non-résident, la mutation à titre gratuit des titres de cette société sera soumise aux DMTG en France si cette société constitue une société à prépondérance immobilière (sous réserve d’une convention fiscale applicable le cas échéant), mais l’assiette sera réduite à la seule fraction de la valeur vénale de ces titres correspondant à la proportion existant entre la valeur vénale de l’immeuble français sur celle de l’actif brut total mondial de la société.

Exemple 2 : Prenons le cas d’une société française détenue à 100 % par un résident américain, propriétaire d’un immeuble français de 2 millions d’euros et de valeurs mobilières luxembourgeoises valorisées à 500.000 euros. La valeur nette totale des titres de cette société française s’élève à 900.000 euros. Au décès de l’associé, les titres de la société française transmis à ses enfants seront soumis aux droits de succession français sur leur valeur vénale totale, soit 900.000 euros (l’article 5 de la convention fiscale franco-américaine en matière d’impôts sur les successions et les donations du 24 novembre 1978 permet à la France d’imposer cette mutation).

Reprenons les mêmes données de l’exemple précédent, mais avec une détention via une société luxembourgeoise. Cette société sera qualifiée de société à prépondérance immobilière en France (toujours sur la base de l’article 5 de la convention fiscale franco-américaine en matière d’impôts sur les successions et les donations) dont la transmission à titre gratuit est imposable en France. Toutefois dans ce cas, seule la fraction de la valeur des titres de la société luxembourgeoise correspondant à la valeur vénale de l’immeuble français sera imposable en France par rapport à l’actif total de la société, soit 2 millions d’euros / (2.000.000 euros + 500.000 euros) x 900.000 euros, soit seulement 720.000 euros, au lieu des 900.000 euros du cas précédent).

Le mode de financement de l’acquisition du bien immobilier par la société doit également être pris en compte pour la structuration de la détention.

Exemple 3 : Si un résident irlandais acquiert un immeuble en France d’une valeur de 1 million d’euros par le biais d’une SCI française et qu’il finance l’acquisition par des avances de même montant (1 million d’euros) en compte courant au profit de cette dernière, le résident sera réputé détenir (i) des titres d’une société à prépondérance immobilière française et (ii) une créance sur un débiteur français (la société française).

Il n’existe pas de convention fiscale entre la France et l’Irlande en matière de donation ou de succession. Ainsi, au décès de l’associé irlandais, seules les règles de droit interne français (c’est-à-dire les règles de territorialité de l’article 750 ter du CGI) s’appliqueront, ce qui signifie que les transmissions pour cause de mort des titres de la SCI et de la créance en compte courant seront soumises aux droits de succession en France. Ainsi, même si la valeur des titres de la SCI est nulle du fait de son endettement (3), le compte courant d’une valeur de 1 million d’euros sera imposable en France.

Cependant, si cette personne avait acquis l’immeuble français via une société irlandaise par exemple, avec le même mode de financement, la solution aurait été différente : si les titres étaient restés assujettis aux DMTG, la créance de compte courant aurait alors constitué une créance détenue sur un débiteur étranger, partant non imposable en France au regard des règles de territorialité françaises. Par ailleurs, la valeur des titres de la société soumis aux DMTG, serait quasi nulle.

L’existence éventuelle d’une convention fiscale entre la France et l’Etat de résidence du défunt-donateur peut également influer sur la structuration de la détention d’un bien immobilier via une société.

Exemple 4 : Envisageons le cas d’un Français résident fiscal monégasque détenant des actifs immobiliers en France à travers des SCI monégasques. A son décès, ses enfants résidents de France héritent de ses parts de SCI monégasques. La convention fiscale entre la France et Monaco en matière de succession du 1er avril 1950 prévoit que les immeubles sont imposables dans leur Etat de situation mais que les titres de sociétés relèvent de l’article 6 qui retient une imposition exclusive dans l’Etat de résidence du défunt. La Cour de cassation, dans un arrêt récent (Ass. Plén. 2 octobre 2015 n°14-14.256), a confirmé que les parts de sociétés immobilières ne pouvaient être assimilées à des immeubles pour l’application de cette convention en l’absence de stipulation conventionnelle expresse en ce sens, quand bien même il s’agirait de sociétés à prépondérance immobilière en France. Ainsi, en l’espèce, s’agissant de parts de sociétés monégasques, même composées exclusivement d’immeubles français, les dispositions de cette convention réserveront le droit d’imposer cette succession exclusivement à Monaco.

DONATIONS EFFECTUÉES DANS UN CADRE INTERNATIONAL ET RAPPEL ÉVENTUEL DES DONATIONS ANTÉRIEURES

Cette question concerne les personnes transférant leur domicile fiscal en France et l’impact de donations qu’elles auraient reçues avant leur arrivée sur le sol français sur des donations/successions dont elles pourraient bénéficier dans l’avenir au regard des règles de rapport fiscal prévues par l’article 784 du CGI.

La règle de rappel fiscal s’applique lorsqu’une première donation est suivie d’une succession ou d’une seconde donation et produit deux principaux effets :

- les abattements applicables à la seconde transmission à titre gratuit tiennent compte des abattements déjà appliqués lors de la première donation intervenue moins de quinze ans plus tôt ;

- les biens transmis lors de cette première donation viennent augmenter la valeur de l’actif, objet de la seconde transmission à titre gratuit. Lorsque cette mutation est soumise à un tarif progressif, les droits afférents à la seconde donation ou à la succession doivent être calculés en tenant compte de tranches les plus élevées de l’actif imposable.

La question de l’application de ce texte peut donc se poser dans un cadre international lorsqu’une personne transmet ou bénéficie d’une mutation à titre gratuit non encore soumise aux droits de donation ou de succession en France (soit du fait que les conditions de territorialité précitées ne sont pas remplies à cette date, soit par l’effet d’une convention fiscale internationale) et qu’elle reçoit ou transmet, moins de 15 ans plus tard, dans le cadre d’une seconde mutation à titre gratuit imposable en France impliquant la même personne. Dans cette situation, l’administration pourrait être tentée d’appliquer la règle du rappel fiscal.

Exemple 5 : Un résident fiscal belge procède à la donation d’actifs immobiliers belges pour un montant de 2 millions d’euros au profit de son fils, également résident fiscal belge. Dans cette situation, cette donation est bien sûr hors du champ des droits de donation français.

Par la suite, cette personne transfère son domicile fiscal en France et, moins de 15 ans après la première donation, consent à nouveau une donation portant sur un immeuble français d’une valeur de 300.000 euros au même enfant.

L’administration fiscale française serait alors susceptible de retenir l’une des deux approches suivantes :

- La première, la plus extensive, consiste à appliquer pleinement l’article 784 du CGI pour considérer que les 2 millions d’euros relatifs à la donation précédente doivent être rapportés pour le calcul de l’assiette de la seconde donation, portée ainsi à 2,3 millions d’euros avant réduction de l’abattement de 100.000 euros applicable en ligne directe (droits de donation de 752.000 euros).

- La seconde, limitée, consiste à affirmer que, pour le calcul des droits applicables à la seconde donation dont l’assiette serait de 300.000 euros, la précédente donation serait prise en compte pour considérer (i) d’une part que l’abattement de 100.000 euros pour les mutations en ligne directe a déjà été « fictivement » appliqué et (ii) d’autre part, que l’ensemble des tranches jusqu’à 45 % (jusqu’à 1.805.677 euros pour le barème en ligne directe) ont été consommées, ce qui conduirait à imposer intégralement la seconde donation au taux de 45 % (droits de donation de 135.000 euros).

A notre connaissance, il n’existe pas de jurisprudence ni de doctrine administrative sur cette question. Toutefois, la première interprétation semble contestable dans la mesure où la règle du rappel fiscal des donations antérieures n’a pas vocation à étendre les règles de territorialité de l’article 750 ter du CGI puisqu’elle aboutirait à taxer a posteriori des mutations qui étaient hors du champ des DMTG lors de leur réalisation.

Dans ce sens, il peut être noté qu’à deux reprises, lorsque les règles de territorialité des DMTG ont été modifiées (en 1977 pour inclure les biens situés hors de France, puis en 1999 pour inclure les mutations au profit de bénéficiaires résidents français), l’administration a indiqué que la règle du rappel fiscal ne s’appliquait pas aux donations réalisées avant la réforme et hors du champ des DMTG (positions respectivement incluses au BOI-ENR-DMTG-10-50-50 n°40 et dans l’instruction du 26 avril 1999, BOI-7 G-5-99). Ainsi, si ces deux doctrines ne sont pas entièrement transposables, elles laissent à penser que l’administration n’entend pas appliquer les règles du rappel fiscal lorsque la précédente donation était hors du champ territorial des DMTG.

Néanmoins, dans les deux cas, l’administration a indiqué que le rappel fiscal pouvait concerner les dons manuels antérieurs, même ceux consentis à une époque où les parties étaient hors du champ des DMTG, en vertu du principe selon lequel les dons manuels non déclarés sont imposables au jour de leur révélation. Dès lors, l’administration conserve la possibilité de les imposer dans le cadre d’un rappel fiscal.

Conclusion : Selon la Commission européenne, plus de 14 millions de ressortissants de l’Union résideraient dans un Etat membre autre que leur Etat d’origine et le nombre de successions internationales au sein de l’Europe serait d’environ 450.000. Parallèlement, le risque de double imposition des successions et donations transfrontalières a déjà fait l’objet d’études approfondies depuis plusieurs années au niveau communautaire sans aboutir à une solution générale (du type « one succession-one tax ») pour pallier le faible nombre de conventions fiscales relatives aux DMTG.

En outre, le mécanisme d’élimination de double imposition prévu par le droit français (4) étant seulement partiel (impôt étranger imputable seulement dans la limite de l’impôt français afférent aux biens étrangers, non imputable sur l’impôt français afférent aux autres biens), le risque de double imposition demeure, a fortiori, en cas de conflit de résidence fiscale du défunt-donateur ou du bénéficiaire, où les deux Etats concernés sont potentiellement susceptibles de revendiquer l’imposition de la succession/donation mondiale.

Avec la croissance de la mobilité internationale, ces risques de conflit de résidence devraient se multiplier. 

 

(1) Article 641 du CGI.

(2) L’article 750 ter du CGI renvoie à l’article 4 B du CGI ; BOI-ENR-DMTG-10-10-30, n°30.

(3) à l’inverse des mesures de l’article 885 T ter du CGI en matière d’ISF,  il n’existe pas de dispositif particulier de calcul de l’assiette imposable des titres d’une société à prépondérance immobilière tenant compte des créances d’associés. Celles-ci constituent donc bien un passif déductible de la valeur vénale des titres aux fins des DMTG français à condition que ces dettes puissent bien sûr être justifiées dans leur principe et leur montant au moment du décès, de même que le bien-fondé du recours à l’interposition de la société étrangère.

(4) Article 784 A du CGI.