
Brexit : une ordonnance pour sécuriser les produits financiers

À quelques jours de la fin de la période de transition fixée au 31 décembre 2020, l’Élysée publie au Journal Officiel deux ordonnances tirant les conséquences du retrait du Royaume-Uni (Grande-Bretagne et Irlande du Nord) de l’Union européenne, l’une relative aux produits financiers, l’autre aux sociétés des professions réglementées (JO, 17 déc. 2020).
Contrats d’assurance
L’ordonnance n° 2020-1595 du 16 décembre 2020 tire les conséquences du Brexit en matière d’assurance, de placements collectifs et de PEA. Elle entre en vigueur le 1er janvier 2021, sécurisant l'exécution des contrats conclus avant le Brexit en matière d'assurance.
Le nouvel article L. 310-2-3 du Code des assurances relatif au régime de gestion extinctive qui s'appliquera post-Brexit aux contrats liant des assurés français et des assureurs britanniques décrit l'ensemble des opérations d'assurance qui ne peuvent plus être pratiquées par des entreprises ayant perdu leur passeport européen. Les contrats ne peuvent ni être renouvelés, ni prorogés, ni reconduits, ni donner lieu à toute opération qui impliquerait l'émission de nouvelles primes. Cette prohibition ne s'étend toutefois pas au paiement fractionné ou différé des primes prévues par le contrat, ou, postérieurement à l'émission des primes, à un ajustement éventuel, à titre de régularisation, du montant initialement payé.
Les contrats qui auraient fait l'objet d'une opération d'assurance interdite sont nuls, mais cette nullité n'est pas opposable aux assurés, aux souscripteurs et aux bénéficiaires. Ainsi, « un organisme d'assurance britannique qui (…) réaliserait une des opérations interdites s'exposerait à ce que son client, même en l'absence de tout dommage, demande en justice l'annulation du contrat, c'est-à-dire le remboursement de l'intégralité des primes. En revanche, l'organisme d'assurance britannique ne pourrait jamais demander cette annulation. Cette asymétrie paraît particulièrement incitative au transfert pré-Brexit des contrats qui n'auraient pas déjà été transférés, et est très protectrice des assurés français. », précise le rapport accompagnant l’ordonnance.
Ensuite, les entreprises qui ne se trouvent plus en situation de pouvoir renouveler, proroger ou reconduire les contrats existants et qui ne peuvent non plus émettre de nouvelles primes doivent en informer leurs assurés, afin que ceux-ci soient en mesure de s'adapter à cette nouvelle situation.
Placement collectif et PEA
Des mesures de transition relatives aux PEA et PEA-PME et aux placements collectifs (FCPR, FPCI et FIP) sont également prévues.
Pour les PEA et PEA-PME, est maintenue l'éligibilité à l'emploi du PEA et du PEA-PME :
- des titres britanniques acquis avant le 31 décembre 2020 ;
- des titres britanniques acquis avant ou après la date de fin de la période de transition par des OPC qui sont éligibles au PEA ou au PEA-PME à la date de publication de l'ordonnance ;
- des parts ou actions d'OPC britanniques acquis avant la même date, sous réserve qu'ils continuent de respecter les règles d'éligibilité au PEA et PEA
Ce maintien de l'éligibilité est établi pour une durée fixée par arrêté du ministre de l'économie qui ne peut excéder 2 ans.
Pour les FCPR, FCPI et FIP, l'éligibilité est maintenue :
- des titres cotés émis par des sociétés britanniques de capitalisation boursière inférieure à 150 millions d'euros, pour une durée fixée par arrêté du ministre de l'économie au quota d'investissement de 50 % des FCPR ;
- des titres ou parts émis par des sociétés britanniques et des avances en compte courant consenties à ces sociétés au quota d'investissement de 70 % applicable aux FCPI et FIP, dès lors qu'ils ont été acquis ou consentis par ces fonds avant le 31 décembre 2020. Ces mêmes fonds peuvent continuer à investir dans des sociétés britanniques après la date du 31 décembre, dans le cas où ces fonds se seraient engagés à acquérir des titres émis par ces sociétés dans le cadre de pactes d'actionnaires ou d'accords conclus avec l'émetteur.
Structures des professions réglementées
L’ordonnance n° 2020-1596 du 16 décembre 2020 portant diverses mesures relatives aux sociétés établies en France dont tout ou partie du capital social ou des droits de vote est détenu par des personnes établies au Royaume-Uni concerne les professions réglementées.
Si l’accord de retrait du 31 janvier 2020 avait repris les mesures relatives à la reconnaissance des qualifications professionnelles, les conditions mises à la détention du capital et des droits de sociétés d'exercice - ou de participation financière - de professions réglementées ainsi que celles touchant à l'activité des succursales de ces mêmes professions, n’étaient pas couvertes.
L’ordonnance reprend, avec quelques adaptations, les dispositions qui figuraient aux articles 15 et 16 de l'ordonnance n° 2019-76 du 6 février 2019. Ainsi, pour les SEL, les SPFPL et les sociétés prévues par les textes statutaires relatifs aux professions juridiques et judiciaires et aux experts-comptables et commissaires aux comptes -, l’ordonnance prévoit que les personnes établies à titre principal au Royaume-Uni ne pourront pas augmenter leur participation dans ces sociétés ou la céder à une autre personne établie au Royaume-Uni.
Quant aux succursales de droit britannique exerçant la profession d'avocat ou celle d'expert-comptable, il est prévu que les structures existant au dernier jour de l'accord de transition, pourront poursuivre leurs activités mais qu’aucune nouvelle succursale ne pourra être créée postérieurement au retrait du Royaume-Uni.