
Bien s’orienter dans le maquis des procédures
Les recours contre l’administration fiscale peuvent être contentieux ou gracieux. Dans le premier cas, le contribuable s’oppose au bien-fondé de la taxe qu’il supporte et dans le second, il sollicite la bienveillance de l’administration en espérant que la charge fiscale soit atténuée.
LE RECOURS CONTENTIEUX
L’article L.190 du Livre des procédures fiscales (LPF) pose le principe de l’exercice par un contribuable d’une demande en décharge ou en réduction d’impôt lorsqu’il estime être imposé à tort ou désire obtenir la restitution d’un trop-perçu par l’administration. « C’est une formalité qui impose au redevable de nouer le dialogue avec le service des impôts avant de pouvoir régulièrement saisir les tribunaux », précise Stanislas Vailhen, avocat associé au sein du cabinet Alérion. La requête est déposée dans un délai fixé au 31 décembre de la deuxième année suivant la date de versement de l’impôt, mais ce principe souffre des exceptions (lire l'encadré). Le 31 décembre 2008 constitue par exemple la date limite pour contester les impositions mises en recouvrement ou payées en 2006. « C’est un simple courrier adressé avec accusé de réception auquel doit être joint le document formalisant la mise en recouvrement des impositions et qui fige la réclamation devant l’administration. Par la suite, le réclamant n’est pas nécessairement tenu par sa première demande, il peut parfaitement présenter de nouvelles réclamations fondées sur d'autres arguments à condition de respecter le délai général de réclamation », poursuit l’avocat.
L’inspecteur des impôts, qui prend position dans les six mois suivant la date de présentation de la réclamation, peut toutefois aviser le contribuable avant l'expiration de ce délai qu'une période complémentaire, qui ne peut excéder trois mois, lui est nécessaire pour statuer.
Saisie du tribunal. La position adoptée par l’administration à l’issue de la phase précontentieuse conditionne la poursuite de la réclamation. En effet si le désaccord persiste, l’affaire est portée devant le tribunal compétent dans un délai de deux mois à compter de la réception de la notification de la décision de l’administration. A ce propos, la jurisprudence retient la notion de délai franc qui ne prend pas en compte le jour de la notification de la décision. Le contribuable dispose encore d’un délai de deux mois à compter de la notification du jugement pour interjeter appel puis se pourvoir en cassation.
Sursis de paiement compensation. En principe, la contestation ne dispense pas du paiement dans le délai légal de l’impôt, mais rien n’empêche l’intéressé de demander un sursis. Il doit être expressément formulé dans la réclamation et ne peut être refusé que si le contribuable n'a pas constitué auprès du comptable des garanties suffisantes, précise Stanislas Vaihlen. Cette demande suspend l'exigibilité de l'impôt jusqu'à la décision définitive rendue par un tribunal ou, en l’absence de saisie du juge, jusqu'à l'expiration du délai dont dispose l'intéressé pour le saisir. « Pour éviter les difficultés, il est préférable d’informer, dans le même temps, les services chargés du recouvrement de l’existence de cette demande. Ce sursis est accordé de droit si l’on présente les garanties suffisantes constituées par un nantissement ou une hypothèque », poursuit le juriste. Lorsqu'il fait appel, le contribuable ne bénéficie plus du sursis de paiement mais il peut demander la suspension de la mise en recouvrement de l'imposition.
Charge de la preuve. Qui supporte la charge de la preuve : le contribuable ou l’administration ? De la réponse à cette question dépend la procédure d'imposition. Le législateur considère, aux termes des l’article R. 191-1 et suivants du LPF, que le contribuable démontre que l'imposition est exagérée lorsque la base d'imposition est conforme à la déclaration qu’il a produite. Plus généralement, en vertu du principe selon lequel les parties doivent prouver ce qu'elles avancent, la charge de la preuve revient à l'administration lorsqu'elle invoque l'existence d'une activité imposable. Par exemple, les services fiscaux ont récemment introduit des procédures de requalification en traitement et salaires de revenus perçus par des dirigeants d’entreprise en considérant que les sommes tirées de bons de souscriptions d’actions étaient placées sur des PEA pour des raisons exclusivement fiscales, seuls les prélèvements sociaux CSG-CRDS étant prélevés sur les sommes.
Le contribuable, de son côté, doit prouver, toujours à titre d'exemple, le fait qu'il remplit les conditions d'application d'un régime dont il demande le bénéfice. Ainsi, par rapport aux articles L. et R. 193-1 du LPF, il démontre que la base d’imposition est exagérée lorsque celle-ci a été établie d’office.
La question de la charge de la preuve est donc loin d’être définitivement tranchée et alimente régulièrement le contentieux.
Particularités des juridictions. La juridiction administrative est compétente pour connaître des recours pour excès de pouvoir visant à obtenir l’annulation d’un acte administratif. C’est également devant ces tribunaux qu’un administré introduit une demande tendant à obtenir de l'administration des indemnités ou des dommages-intérêts, justifiant d’une faute lourde, susceptible d'engager la responsabilité de l'Etat.
La procédure demeure sensiblement identique devant les juridictions judiciaires dont la compétence prévaut en matière de droits d’enregistrement ou d’ISF, en vertu des articles L. 199, R. 199-1 et suivants du LPF avec une différence toutefois, dans la mesure où une expertise est obtenue de droit par l’une ou l’autre des parties qui en fait la demande, en termes de droits d'enregistrement notamment pour la détermination de la valeur réelle des immeubles. Le contribuable s’adresse au TGI non plus par courrier mais par voie d’huissier, ce qui raccourcit considérablement le délai.
LE RECOURS GRACIEUX
A la différence du recours contentieux, le recours gracieux ne constitue pas la revendication d’un droit par le contribuable, il consiste plutôt à faire appel à la bienveillance
de l’administration.
Par ce recours, développé aux articles L. 247 et suivants du LPF, le contribuable demande la remise d’impositions régulièrement établies. Les demandes relatives aux pénalités peuvent être formulées sur toutes les impositions, celles qui visent l'impôt ne sont possibles qu'en matière d'impôts directs et sont fondées sur des motifs de gêne, mettant le contribuable dans l'impossibilité d’honorer un paiement. Ces recours ne sont soumis à aucune condition de délai et sont rédigés sous forme de simple lettre.
La décision de rejet d’une demande gracieuse peut être contestée par la voie du recours pour excès de pouvoir, dans un délai de quatre mois, date à laquelle par ailleurs l’absence d’une prise de position de la part des services fiscaux constitue une décision implicite de rejet.
Transaction. La voie de la transaction peut également être privilégiée pour obtenir l’atténuation des pénalités qui ne sont pas définitives. La position dégagée par l’administration est susceptible de contestation. En revanche, les transactions exécutées par les redevables et approuvées par l'autorité compétente sont définitives, tant pour ce qui concerne les droits que les pénalités, et font obstacle à toute introduction ou reprise d'une procédure contentieuse. « Souvent, la transaction permet notamment d'obtenir des délais de paiement. Officiellement, l’administration ne transige que sur des pénalités ; dans la pratique, elle accepte également les transactions portant sur les droits », précise le juriste.
Au sein de l'administration fiscale, la décision est prise, selon l'importance de la somme faisant l'objet de la demande, par le directeur chargé d'une direction des services fiscaux, le directeur chargé d'un service à compétence nationale ou le ministre.
Dégrèvements et restitutions d'office. L'administration a la possibilité de rectifier par voie de dégrèvement d'office les erreurs commises au préjudice des contribuables, malgré la déchéance pour inobservation des délais. Cette faculté peut être exercée jusqu'au 31 décembre de la quatrième année suivant celle de l'expiration du délai de réclamation ou, en cas d'instance, celle de la notification de la décision intervenue.