ASSURANCE VIE / RENONCIATION

Arbitrage et nantissement ne font pas perdre le droit à renonciation

Confirmant une position constante depuis 2006, la Cour de cassation censure un arrêt d’appel qui invalide une renonciation tardive à un contrat d’assurance vie.

Un particulier emprunte un capital auprès d’une banque qu’il place ensuite sur un contrat d’assurance vie. Un avenant au contrat prévoit la mise en gage de l’assurance vie pour garantir le prêt. Peu après, l’assuré oriente ses fonds vers des supports plus dynamiques que les précédents. Cinq années plus tard, la valeur du produit d’assurance ne suffisant pas à rembourser le prêt, deux nouveaux emprunts sont conclus, également garantis par le même contrat d’assurance vie. L’assuré déclare par la suite renoncer au contrat et demande le remboursement des capitaux investis, ce que la compagnie d’assurance refuse. Le souscripteur l'assigne alors en paiement.

Un droit à renonciation prorogé…

La cour d’appel déboute le requérant. Elle admet dans un premier temps que le délai de renonciation n’avait effectivement pas commencé à courir, « les conditions générales valant note d'information remises lors de la souscription du contrat ne constituant pas la note d'information prévue par l'article L. 132-5-1 du Code des assurances ».

Les juges du fond avancent, dans un second temps, que l’assuré a cependant effectué un certain nombre d’actes tels qu’un arbitrage et un nantissement du contrat, démontrant qu’il a, en quelque sorte, renoncé à son droit à renonciation. En effet, tous ces actes « attestaient de [la] volonté [de l’assuré] de voir se poursuivre le contrat [d’assurance], ce qui était incompatible avec l'exercice du droit de renonciation », indiquent les juges du fond, ajoutant « que [le souscripteur] avait déjà perdu ce droit de renonciation lorsqu'il avait prétendu l'exercer ».

… et auquel l’assuré ne peut pas renoncer.

La Cour de cassation censure cette décision, estimant qu’il est impossible de renoncer « au bénéfice du formalisme protecteur et d'ordre public énoncé à l'article L. 132-5-1 du Code des assurances », le droit de renonciation n’ayant pas alors pris naissance. « La Haute juridiction considère que tant que l’information requise à l’article L. 132-5-1 du Code des assurances n’a pas été fournie à l’assuré, le droit de renonciation de ce dernier n’est pas né, commente Denis Coron, responsable juridique chez Neuflize Vie. Or, les actes d’exécution effectués par le souscripteur attestent de l’existence même du contrat. Il est curieux, pour ne pas dire paradoxal, de considérer que le droit de renonciation n'est pas né tout en considérant par ailleurs que l'assuré peut renoncer au contrat dans la lettre qu'il adresse à l'assureur. Donc, pour ma part, je renonce à comprendre cet arrêt. »

« Cet arrêt est dans la lignée de ce qui a été jugé depuis 2006, il est en effet impossible de renoncer à ce droit à renonciation. En outre, il a déjà été jugé que les opérations antérieures de l’assuré, notamment les opérations d’arbitrage et de rachats partiels, ne constituent pas un obstacle à l’exercice du droit à renonciation de l’assuré », rappellent, pour leur part, Nicolas Lecoq Vallon et Hélène Feron-Poloni, avocats associés du cabinet Lecoq Vallon & Associés.

Cass. civ. 2, 3 septembre 2009, n° 09-10475