Assurance vie

Réponse Ciot : un rappel utile

Une réponse ministérielle a remis sur le devant de la scène la réponse Ciot 
Elle rappelle le principe de neutralité fiscale au profit de contrats non dénoués 
Murielle Gamet, notaire associée à l’étude Cheuvreux

La publication de la réponse ministérielle Ciot a sans conteste représenté un évènement marquant en matière de précision fiscale dans le domaine de l’assurance vie ces dernières années (1). Celle-ci, confirmée ensuite dans le Bofip, a en effet acté le principe de neutralité fiscale portant sur la valeur de rachat des contrats d’assurance vie non dénoués souscrits par des époux mariés sous le régime de la communauté, mettant ainsi fin à l’application de la réponse ministérielle Bacquet (2). En effet, il était apparu selon la réponse du ministère de l’Economie au député Jean-David Ciot que « le strict alignement de la règle fiscale sur la règle civile, sans prise en compte des spécificités juridiques du contrat d’assurance vie, conduisait à d’importantes difficultés pratiques ».

Les effets de la réponse Ciot. Ce commentaire est ainsi venu alléger la facture fiscale dans le cas où chaque époux souscrit un contrat d’assurance vie au profit de son conjoint. Avec la réponse Baquet, les contrats conclus par le conjoint survivant, donc non dénoués, « se sont retrouvés inclus dans la masse active de succession et les héritiers payaient des droits de succession plus élevés », alors que « la valeur de rachat d’un contrat d’assurance vie n’était à ce stade pour les héritiers que sont les enfants qu’une créance virtuelle », explique Murielle Gamet, notaire associée à l’étude Cheuvreux.

Précisions de la réponse Laqhila. La réponse Laqhila du 13 novembre dernier est donc venu enfoncer le clou sur ce principe de neutralité fiscale, tout en apportant une précision importante en matière de date d’application (3).
En effet, si la réponse Ciot indiquait bien que ce principe s’appliquait aux successions ouvertes à compter du 1er janvier 2016, se posait la question de savoir si elle était applicable aux décès survenus antérieurement à cette date. Dans sa réponse de novembre, « le ministre de l’Economie répond clairement non, ce qui arrive un peu tard presque trois ans après la réponse Ciot », regrette Murielle Gamet. Et cette précision aurait pu entraîner des contentieux fiscaux « par exemple pour les dossiers traités entre le 1er janvier et le 23 février 2016 avec non réintégration du contrat d’assurance vie à l’actif, ou pour les dossiers ouverts en tenant compte de la réponse Ciot alors qu’ils n’y avaient pas droit ». 

Pérennité de la réponse. Une chose est sûre en tout cas, « cette tolérance fiscale ne devrait pas être remise en cause à l’avenir » selon Michel Leroy, responsable du master II, ingénierie du patrimoine à l’Université Toulouse I – Capitole. En effet, « cette neutralité est une règle qui découle de la nature même du contrat d’assurance vie » lequel, « relève d’une stipulation pour autrui présupposant une intention libérale à l’égard d’un tiers au contrat, le bénéficiaire, qui est destiné à recevoir les sommes désignées lors du dénouement du contrat », selon une réponse ministérielle de juillet 2016 (4). D’ailleurs, cette réponse refuse d’élargir la neutralité fiscale aux PEA ou comptes courants.

Anticipation civile de mise. Si le principe de neutralité fiscale n’est pas touché avec la réponse ministérielle de novembre, l’anticipation reste toujours de mise en matière civile pour pouvoir trouver un équilibre familial. « L’outil idéal est d’apporter à la communauté avec une clause d’attribution intégrale ou une clause de preciput toutes les valeurs de rachat des contrats d’assurance vie apportées avec des fonds communs », souligne Murielle Gamet, de telle sorte que la totalité du contrat devient commune. Ainsi, « la valeur de rachat ne rentre plus dans l’actif de la communauté, et n’est donc plus dans l’assiette de calcul de quotité disponible d’un point de vue civil ».


(1) Réponse ministérielle Ciot. Journal officiel du 23 février 2016. Question écrite n°78192.
(2) Réponse ministérielle Bacquet. JO du 29 juin 2010. Question écrite n°26231.
(3) Réponse ministérielle Laqhila. JO
du 13 novembre 2018.  Question écrite n°1594.