
Projet de loi de Finances : premières consignes patrimoniales

Jean Malhomme, directeur Epargne et Prévoyance AXA France
Pour AXA France, les clients concernés par la flat tax représentent la moitié de notre activité. Une augmentation de la fiscalité n’est en soi jamais une bonne nouvelle pour les clients, même si cette décision a pour objectif de contribuer plus activement au financement de la vie économique de notre pays. Il convient donc d’examiner les conséquences de cette nouvelle mesure à court et long terme, pour les épargnants d’un côté et pour notre stratégie de l’autre. La flat tax, qui touche le produit d’épargne préféré des Français, va-t-elle profondément en modifier la teneur et, par voie de conséquence, modifier à terme le comportement des clients en matière d’épargne ? Ce sont les questions que nous nous sommes posées et que nous essayons d’anticiper au mieux, malgré des délais incroyablement serrés.
Notre conviction au sein d’AXA France, c’est que les grands équilibres ne seront pas modifiés et que l’assurance vie restera longtemps encore l’outil idéal pour préparer sa retraite, sa succession et faire fructifier son capital. Ce sont d’ailleurs actuellement les trois principales raisons de souscrire un contrat. Selon une enquête SCAN clients CSA/ AXA de septembre 2016, la fiscalité ne représente que 10% des raisons d’épargner en assurance vie.
L’assurance vie n’a donc perdu aucun de ses attraits, l’augmentation de 5 points, pour les épargnants concernés, ne devrait donc pas modifier ces choix. Ces nouvelles dispositions vont par ailleurs permettre à l’épargne de court terme d’être moins « pénalisée » qu’auparavant. Nous passons par exemple d’un taux forfaitaire de 50,5% les quatre premières années à 30%. C’est une opportunité pour séduire de nouveaux clients. Le challenge de la profession, sera ensuite de les « transformer » en épargnants « classiques », qui conservent leur contrat en moyenne 11 ans.
Parallèlement, il est à noter un point important du projet présenté le 27 septembre.
L’assurance vie sort en effet du champ du nouvel ISF tandis que la partie immobilière des contrats d’assurance vie (notamment les OPCI) resterait, elle, imposable à l’IFI, l’impôt sur la fortune immobilière. Par rapport aux engagements de campagne sur l’encouragement de l’économie productive versus la rente immobilière, cela semble discutable. En effet, AXA propose à ses clients, par exemple, un support immobilier orienté vers les services à la personne qui finance des maisons de retraite, des EHPAD, des résidences étudiantes et des crèches… ce qui est assez loin d’une « rente immobilière ».
Voici les attraits mentionnés par AXA :
Marion Chapel-massot, Directeur gestion privée, Equance
Les revenus issus des contrats d’assurance vie
Bien que visée par la Flat tax, l'assurance vie conserverait tout de même un régime fiscal dérogatoire. Les produits des contrats d'assurance-vie afférents à des versements antérieurs au 26 septembre 2017 continueraient d'être imposés suivant le régime actuellement en vigueur pour les contribuables.
Seules les primes versées à compter du 27 septembre 2017, sur un contrat d’assurance-vie nouveau ou ancien, seraient concernées par cette nouvelle taxation.
Cependant :
Le PFU s’appliquerait uniquement si la prime versée a pour conséquence de porter « le cumul des primes nettes assurance-vie de l’épargnant sur l'ensemble de ses contrats » au-delà de 150 000 € (ou 300 000 € pour un couple soumis à imposition commune). Cette somme correspond à l’addition des primes nettes versées sur tous les contrats d’assurance-vie et de capitalisation en cours, pour cet assuré, quelles que soient les dates de souscription.
Exemple : Versement d’une prime de 100 000 € en 2010,
Rachat en 2015 de 25 000 € dont 5 000 € d’intérêts et 20 000 € de capital,
Versement en octobre 2017 de 100 000 € :
Le cumul des primes nettes s’établit à 100 000 € – 20 000 € + 100 000 € = 180 000 €, dont 100 000 € concernés par le PFU…
Le PFU s’appliquerait sur les seuls intérêts générés par ces primes supplémentaires, pour les rachats réalisés à partir du 1er janvier 2018, selon une règle complexe proportionnelle édictée par le texte.
Exemple : rachat en 2018 sur le même contrat, la quote-part des intérêts générés par les primes versées en octobre 2017 incluse dans le rachat sera taxée au régime classique à hauteur de 150 000 € (montant du seuil) – 80 000 €/ 100 000 € = 70 % et à 30 % au PFU
En conséquence :
Un épargnant qui possède un cumul de primes nettes en assurance-vie inférieur à 150 000 € (300 000 € pour un couple) ne serait pas impacté immédiatement par les aménagements de la loi de finances pour 2018. Tant qu’il resterait en deçà de ce seuil, même s’il versait des primes après le 27 septembre 2017, ses rachats seraient soumis aux règles « classiques » :
- Prélèvement libératoire à 35 % + PS à 17,2 % avant 4 ans
- Prélèvement libératoire à 15 % + PS à 17,2 % avant 8 ans
- Prélèvement libératoire à 7,5 % + PS à 17,2 % après 8 ans après un abattement de 4.600 € annuels pour une personne seule et de 9.200 € pour un couple.
Mais dès que le versement d’une prime aurait pour effet de lui faire franchir le seuil d’encours fatidique, alors tous les intérêts générés par cette prime, et toutes les suivantes, seront potentiellement soumis au prélèvement forfaitaire unique (PFU), en tout ou partie.
Les épargnants qui possèdent d’ores et déjà un cumul de primes nettes d’assurance-vie supérieur à 150 000 € (300 000 € pour un couple) seraient concernés par la nouvelle taxation pour tout versement supplémentaire.
Les abattements de 4 600 € et 9 200 € après 8 ans resteraient applicables aux intérêts soumis au PFU
Les articles 990 I et 757 B du CGI, qui s’appliquent en cas de décès de l’assuré ne seraient pas modifiés.
Les prélèvements sociaux (non perçus « au fil de l’eau ») exigibles au décès de l’assuré sur les gains latents du contrat seraient désormais portés à 17,2 %.
François Leneveu, président du directoire et cofondateur d’Altaprofits
« Nous continuons à penser que la Flat tax pour l’assurance vie n’est pas une bonne chose car elle pénalise ceux qui ont des capitaux donc ceux qui peuvent être utiles à l’économie ».
Sur ce qu’il faut faire avant le 31/12/2017, échapper à la hausse de la CSG prévue au 1er janvier 2018. Cette initiative concerne plus particulièrement les épargnants qui ont des contrats d’assurance vie aux performances médiocres (par exemple, un fonds euros ayant rapporté moins de 2 % en 2016) et ou avec des frais de gestion élevés (1% ou plus). Dans cette éventualité et sous réserve de l’âge de la personne, « nous recommandons d’effectuer un rachat partiel maximum, de manière à « purger » les plus-values du contrat aux taux actuel de la CSG puis de replacer cette somme sur un contrat d’assurance vie sans frais d’entrée, performants et gérable en ligne ».
Sur ce qu’il faut faire début 2018, pour les épargnants qui détiennent un compte-titres il est notamment question de voir si le nouveau régime de la Flat Tax de 30 % ne leur permettrait pas de céder (enfin) leurs actions dans de bonnes conditions fiscales et replacer le tout dans un contrat d’assurance vie.