
Les mobiliers art déco, art nouveau et le design définitivement exonérés
Par Fabien Bouglé, consultant en gestion de patrimoines artistiques, Saint-Eloy Art Consulting
En vertu de l'article 885 I du Code général des impôts, les objets d'antiquité, d'art ou de collection ne sont pas compris dans les bases d'imposition à l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF). Ainsi, non seulement ils ne sont pas taxés mais en plus, ils ne doivent pas être mentionnés dans la déclaration d’ISF par le contribuable.
La personne assujettie à l’ISF devra en revanche déclarer les bijoux et pierreries et les meubles meublants, c'est-à-dire le mobilier courant évalué par le prix d’une vente publique, l’estimation contenue dans un inventaire notarié ou établi par le redevable et valable trois ans, pour lesquels s’applique un forfait de 5 % de l’ensemble de l’actif brut.
Objets exonérés.
En revanche, elle sera exonérée pour :
- Les œuvres d’art : Dans la catégorie des œuvres d’art sont regroupées toutes les réalisations artistiques, quelle que soit leur ancienneté, entièrement réalisées par la main de l’artiste ou sous son contrôle pour les tirages. Exemples : tableaux, peintures et dessins, statues et sculptures originales, installations et œuvres numériques ou audiovisuelles limitées au plus à douze exemplaires, les tapis et tapisseries…
- Les objets de collection : La reconnaissance de la qualité d'objet de collection dépend de nombreux critères, dont l'ancienneté, la rareté, l'importance de son prix - lequel doit être sensiblement supérieur à la valeur d’un bien similaire destiné à un usage courant - l’intérêt historique. Sont reconnus objets de collection : les timbres postes et, pour les timbres non oblitérés, ceux ayant une valeur de collection supérieure à la valeur faciale ; les ensembles d’objets (objets qui n'ont souvent qu'une valeur intrinsèque réduite, mais qui tirent leur intérêt de leur rareté, de leur regroupement ou de leur présentation (exemples : collections présentant un intérêt historique, ethnographique ou archéologique...).
- Les objets d'antiquité ayant plus de 100 ans d'âge : L'intérêt des objets d'antiquité réside essentiellement dans leur ancienneté. C'est pourquoi la qualité d'objet d'antiquité ne peut être reconnue qu'aux objets ayant plus de 100 ans d'âge. Par exemple : les meubles anciens, cadres et boiseries, incunables, livres, musique, cartes géographiques, gravures, les articles textiles, de joaillerie, d'orfèvrerie, les vitraux, les lustres et luminaires, les articles de ferronnerie et de serrurerie… A défaut d’avoir plus de 100 ans d’âge, les biens d’antiquité sont considérés comme meubles meublants, et donc taxables et déclarables à l’ISF.
Levée d’une incertitude fiscale…
C’est sur ce dernier point que l’administration fiscale a récemment levé une ambiguïté dans une instruction fiscale du 5 décembre 2008. En effet, il subsistait dans le domaine des objets d’antiquité ayant moins de 100 ans d’âge une réelle ambiguïté concernant notamment le mobilier art nouveau et art déco. En effet, ce mobilier pouvait être considéré comme meuble meublant taxable à l’ISF.
La difficulté réside dans le fait que les prix de ce type de mobilier atteignent des sommets sur le marché de l'art. L’administration fiscale souhaitait réintégrer ces meubles dans la déclaration d’ISF alors que les propriétaires invoquaient le caractère artistique des biens. Bref, cette situation était source d’insécurité fiscale et de conflits alors que, naturellement, ce type de mobilier devait être exonéré d’ISF.
… favorable aux objets de valeur.
L’administration fiscale a adopté une position salutaire en clarifiant cette difficulté et en supprimant tout conflit en précisant que la qualification d'objet de collection pourra également découler de l'importance du prix de l’objet concerné, lequel doit être sensiblement supérieur à la valeur d'un bien similaire destiné à un usage courant.
Elle précise ainsi que des objets de moins de cent ans d’âge qui, de ce fait, ne peuvent pas être qualifiés d’objets d’antiquité mais qui présentent cependant un réel intérêt artistique ou culturel et sont valorisés comme tels sur le marché de l’art (mobilier art nouveau ou art déco, par exemple), ont vocation à bénéficier de l’exonération d’ISF.
Cette instruction est applicable à compter du 1er janvier 2009 et aux litiges en cours à la date de sa publication. Il convient de saluer cette doctrine qui pérennise un marché très important en France et qui s’applique au mobilier art déco et art nouveau, mais également à tout bien d’antiquité ayant de moins de 100 ans d’âge, comme le mobilier années 50 et 60.