Assurance vie

Les métiers du back-office en quête de valorisation

Les distributeurs de contrats d’assurance vie développent leur service de back-office adapté à leurs besoins, tous ayant pour objectif de satisfaire aux impératifs de qualité, de réactivité et de coût Avec la crise des marchés financiers, certaines cellules de gestion administrative se sont vu reprocher leur manque de réactivité, d’où la volonté d’améliorer leur image grâce à une communication plus aboutie.

Par définition, le service de gestion administrative des contrats d’assurance vie, également désigné sous le terme de « back-office », est traditionnellement opposé, au sein des établissements financiers, au « front »et au « middle-office ».

A titre d’illustration, dans une compagnie d’assurances, cette segmentation se décline par la présence de commerciaux qui participent à la diffusion des contrats de l’assureur auprès des distributeurs (front-office), eux-mêmesappuyés par des conseillers en charge des appels entrants (middle-office)et d’un service clients (back-office) qui gère l’ensemble des opérations portant sur les contrats, de leur souscription à leur dénouement.

Qu’il s’agisse d’une mutuelle, d’une société d’assurances ou d’une banque, les établissements de la Place se distinguent par la diversité des organisations de back-office qu’ils ont adoptées. Chez Mutavie (groupe Macif), par exemple, ce service est assuré par 15 conseillers épargne et 57 téléconseillers, parmi lesquels une vingtaine de salariés qui s’occupent de la gestion des sinistres. Au quotidien, ces équipes traitent des réclamations « qui portent essentiellement sur la rémunération de l’épargne et les opérations administratives », explique le directeur gestion, relations réseaux et souscripteurs de Mutavie, Patrick Jaulain. A noter que la mutuelle revendique un très faible taux de réclamations. Elle en décompterait 150 pour 870.000 souscripteurs.

Chez Axa Thema, les opérations les plus fréquemment traitées portent à 36 % sur des réorientations d’épargne et à 11 % sur les rachats partiels.

Externalisation du back-office.

Depuis quelques années, certains assureurs ont choisi d’adopter une autre stratégie basée sur la délégation de gestion de leurs contrats à des opérateurs spécialisés, encore peu nombreux, tels Pack Solutions ou bien Accenture Insurance Services (AIS). « Si le recours à ce type de solutions n’est pas très répandu, la conjoncture amène des établissements à réfléchir au développement de solutions informatiques différentes en interne ou en les externalisant viades partenariats », explique Christophe Emprin, le directeur de Pack Solutions (lire l’avis d’expert).

Cette solution a également la faveurs des banquiers. Les caisses régionales du Crédit Agricole et LCL ont ainsi confié la gestion d’une partie de leurs contrats à deux back-offices assurance vie distincts. Une politique qui se veut discrète, les deux sociétés n’ayant pas souhaité s'exprimer sur ce sujet.

Dans le cadre de la mission qui lui est confiée, il n’est pas question que le prestataire offre le même service aux délégants. Pack Solutions est en effet tenu de s’adapter aux besoins de l’assureur : « Nous paramétrons dans l’outil informatique le terme du délai de renonciation en fonction des indications données, selon qu’il retient la date de signature du client ou la date de réception de son courrier comme date d’effet », note son dirigeant. Au niveau des versements, « certains gardent l’encaissement, d’autres préfèrent que nous assurions le flux de trésorerie ».

Réactivité des intermédiaires sur internet.

Sur internet, plus qu’ailleurs, il est nécessaire que les distributeurs de solution vie prêtent attention à la qualité de leur back-office. Argument commercial, la qualité de la prestation rendue fait désormais partie intégrante des critères de sélection surveillés par les prospects. François Leneveu, président du directoire d’Altaprofits, considère en ce sens quela prise en compte des contraintes inhérentes au commerce sur internet implique, à côté des impératifs de qualité et de coût de service,« une réactivité certaine de notre part dans la mesure où la majorité des souscripteurs potentiels sont des épargnants avisés et très attentifs, entre autres, aux données fournies par l’assureur, au délai nécessaire au traitement des arbitrages et à leur respect ».

En cas de réclamation exprimée par le client, si la responsabilité de l’erreur incombe au back-office,« nous redirigeons la demande vers le service de gestion du partenaire en nous assurant, en notre qualité de courtier, de son traitement. Nous savons, par expérience, que les tâches moins usitées ou moins informatisées peuvent poser des difficultés, à l’image des options de gestion, par exemple, qui figurent pourtant dans de nombreux contrats ».

Internet constitue également le moyen d’assouplir certaines des règles de gestion du contrat. Olivier Samain, responsable de la plate-forme Axa Thema, explique que l’extranet « constitue l’un des éléments clés du dispositif dédié aux CGPI qui leur permet d’effectuer des actes en ligne jusqu’à 21 heures pour être exécutés le lendemain ». « Nous avons développé un logiciel permettant au souscripteur d’avoir une vue d’ensemble des trois contrats que nous distribuons, et du rendement de chacun d’eux en fonction de l’allocation d’actifs sélectionnée », observe David Capdevielle, le gérant de Linxea Vie.

Relations CGP/fournisseurs.

En règle générale, la survenance de difficultés sur les marchés financiers éprouve les relations entre les CGPI et leurs partenaires assureurs et autres distributeurs. Il y a quelques mois, « nous avons constaté une augmentation significative des arbitrages, marquée par un pic en janvier 2008, avec 2.500 arbitrages par semaine, soit une multiplication par 10 du chiffre habituel. Par ailleurs, dans le contexte de forte volatilité des marchés, nous notons que ces conseillers sont plus attentifs aux caractéristiques des contrats ainsi qu'aux opérations. Cela se traduit en particulier par une augmentation des demandes d’informations sur les dates d'investissement ou de désinvestissement »,témoigne en ce sens Geoffroy Brossier, directeur du service clients vie de SwissLife.

Les services de gestion administrative ne sont pas les seuls à pouvoir délivrer les informations techniques, mais ils sont en première ligne pour recueillir le mécontentement des conseillers distributeurs. Certains ne se privent pas de les critiquer et se remémorent la situation délicate dans laquelle ils se sont retrouvés en l’absence de réponse des départements de gestion à leurs demandes pendant les mois les plus mouvementés de la crise. « La difficulté tient pour nous à gérer la relation clients ultérieure et à maintenir la crédibilité de la profession »,confesse le directeur commercial d’un groupement de CGP.

C’est une situation d’autant plus complexe qu’il est pratiquement impossible pour l'intermédiaire d’obtenir un quelconque dédommagement. Il lui est également difficile d’interrompre de son chef toute relation avec un assureur « dans la mesure où il lui a confié la majorité des actifs de ses clients afin de profiter d’un partenariat commercial financièrement intéressant », poursuit le responsable du groupement.

Valoriser les fonctions supports.

L’absence de valorisation de la part des assureurs est un autre élément qui joue en défaveur d’une meilleure considération des fonctions supports. « Les établissements ont des difficultés à faire une estimation précise du coût de leur back-office, qu’ils estiment entre 0,2 % et 0,3 % des encours sans nécessairement tenir compte des charges informatiques associées », noteChristophe Emprin. La faible valorisation du métier tiendrait également, de l’avis de certains observateurs, à l’éloignement de la clientèle du gestionnaire de back-office, dépourvu de culture financière et du sens du service clients.

En réaction, certaines sociétés entendent améliorer l’image de leurs back-offices en communiquant sur les engagements qualité auxquels elles se soumettent désormais. Les activités de Mutavie sont ainsi encadrées par 22 engagements de services certifiés par Afnor Certification. Si leur respect représente des contraintes fortes pour les activités de la gestion, c’est aussi le moyen « de fournir à nos souscripteurs un service de qualité irréprochable, avance le dirigeant de la mutuelle. Par exemple, nous sommes en mesure d'affirmer que 95 % des retraits effectués le sont dans un délai de 5 jours ».

De son côté, SwissLife travaille à l’amélioration de son back-office en collaborant avec la direction qualité marque et en élaborant, notamment en partenariat avec la société de sondage Ipsos, un questionnaire de satisfaction. Une meilleure considération de l’activité en termes de rémunération s’est traduite aussi par « le recrutement de trois diplômés de niveau Bac+5 entre 2007 et 2008, en vue de développer des relations plus construites avec les apporteurs », précise SwissLife.

Implication sur le juridique.

Une implication plus soutenue des services de gestion administrative sur les spécificités juridiques des contrats vie constitue également un moyen d’améliorer l’image des back-offices,même si cela est loin d’être évident. A ce niveau, les opérations impliquant des personnes incapables sont souvent considérées comme les plus difficiles à gérer. Sur les problématiques de nantissement ou d’acceptation bénéficiaire, les gérants des back-offices interviennent au cas par cas ou se rapprochent de la direction juridique, en fonction notamment du capital investi.

Les services de back-office doivent aussi s’impliquer dans la recherche des bénéficiaires de contrats d'assurance. Chez Mutavie, le département s’appuie sur un service dédié et sur les informations mises à jour par les partenaires distributeurs, notamment en cas de résiliation des contrats d’assurance dommages. « De toute manière,retient Patrick Jaulain, directeur gestion, relations réseaux et souscripteurs de la structure, cette problématique ne concerne que quelques dizaines de dossiers depuis la création de Mutavie qui gère, par ailleurs, près de 4.500 dossiers décès et 30.000 clauses bénéficiaires par an. »

Information de la clientèle.

La nécessité d’informer la clientèle tous les ans figure parmi les obligations juridiques qui sont à la charge des services de back-office. Chaque année, Pack Solutions adresse aux clients des compagnies les comptes annuels des assurés vers la fin du mois de janvier et le début du mois de février, mais les pratiques varient selon les assureurs. « Certains nous ont ainsi demandé de retarder cette année les envois en escomptant une évolution financière favorable au premier trimestre. D’autres ont préféré supprimer toute référence à une garantie plancher, égale à la somme des versements, sur le document remis », précise Christophe Emprin.

Conservation des données.

En dépit des efforts entrepris pour améliorer la rapidité de traitement des données clients, les back-offices seront certainement toujours confrontés aux difficultés de gestion et aux critiques concernant le délai nécessaire au traitement des demandes. En effet, l’augmentation du volume du portefeuille client et l’ajout fréquent de nouvelles normes législatives ajoutent en permanence à la complexification du système. Sans compter les procédures internes qui tendent à une demande systématique de pièces justificatives.

Même la gestion sur internet, pourtant vantée pour sa souplesse, ne peut pas faire l’économie d’un suivi administratif rigoureux du contrat : « Le rachat en ligne n’exonère pas le conseiller de nous adresser l’acte délégataire qu’il tient du client, reconnaît Olivier Samain, responsable de la plate-forme Axa Thema. Sur ce point, ce professionnel a préalablement signé une convention dans laquelle il s’est engagé à nous transmettre l’ordre validé par son client. En pratique, la proposition d’arbitrage est mise en mémoire dans le système dans l’attente d’une validation. »

Cette situation conduit des experts à s'interroger sur la sauvegarde des fichiers clients et la conservation des informations, « une question de sécurité sur laquelle travaillent de grands cabinets d’avocats », conclut un professionnel.