Les assureurs vie peuvent dire merci à Solvabilité 2

Thibaud Vadjoux
Selon le cabinet Optimind, le régime prudentiel Solvabilité 2 a permis aux acteurs de l'épargne d’amortir le choc de 2022

Les assureurs, bancassureurs et mutuelles spécialisés dans l’épargne-retraite, ont connu une baisse modérée de leurs ratios de solvabilité à fin 2022, calcule le cabinet de conseil Optimind dans son « Benchmark 2023 » basé sur la publication des rapports SFCR* de 27 acteurs. Les mutuelles connaissent la plus forte baisse (-11,5%) mais conservent les ratios les plus élevés à 257% (pour un minimum requis de 100%). Les bancassureurs présentent une marge moyenne de 244% (-6,5%) et les assureurs de 187% (-1,2%). La mise en place de modèles internes de solvabilité chez les assureurs limite les baisses.

Les assureurs vie ont dû faire face en 2022 à une remontée rapide et ample des taux d’intérêts et à la baisse des marchés boursiers, après des années de taux bas. Mais les effets de taux et de marché restent finalement bien amortis. « Force est de constater que le régime prudentiel Solvabilité 2 démontre sa robustesse quant à sa capacité à capter et mesurer correctement les risques et leurs évolutions. En effet, on constate que l’évolution des fonds propres économiques, la baisse du SCR de marché (capital de solvabilité requis, NDLR) et la hausse du SCR Vie et notamment le sous-module rachat massif reflètent bien l’évolution des risques et de l’environnement économique actuel », commente Optimind. La hausse des taux pénalise le portefeuille obligataire des assureurs, mais elle diminue également, au passif, les provisions techniques actualisées à un taux plus élevé. Toutefois, la dispersion s’accroit autour de la moyenne de ces ratios de solvabilité. « Plusieurs entités sont désormais autour ou en dessous du seuil de 150 %, et ce, malgréla création de FRPS (fonds de retraite professionnel supplémentaire, bénéficiant d’un régime prudentiel plus favorable que Solvabilité 2, NDLR) », prévient Optimind.

La revue de Solvabilité 2, attendue pour la fin de l’année, devait prendre en compte les effets des taux bas alors que les acteurs financiers s’adaptent à un nouveau paradigme. « Il est important de pérenniser un calibrage valide quel que soit l’environnement économique et financier », défend Optimind.

Des écarts importants sur la PEE

La hausse rapide des taux perturbe le pilotage des assureurs même si elle est, au fond, une bonne nouvelle à moyen et long terme mais qui se fera attendre pour l’épargnant. « L’inertie du fonds euros ne peut pas bénéficier aussi rapidement de la hausse abrupte des taux que d’autres supports d’investissements. Cela explique en partie que les taux de rendements 2022 des fonds euros ne soient pas aussi compétitifs. De plus, cela pourrait avoir un impact sur la collecte 2023 d’autant que la remontée des taux continue en ce début d’année », souligne Optimind.

Le scénario de hausse des taux était anticipé par les assureurs. Ils y ont répondu en partie en constituant d’importantes réserves. Pour lisser les rendements annuels des fonds euros, la provision pour participation aux excédents (PPE) a été mise à contribution. Elle a diminué en moyenne de 7,8% mais avec des écarts importants à la hausse (+34%) ou à la baisse (-33,8%). « Certains acteurs ont doté ou à l’inverse ont repris de la PPE en fonction de leur capacité à servir un taux concurrentiel, au regard notamment du taux du livret A qui s’établissait à 2 % à fin 2022 », analyse Optimind. Une baisse de chiffre d’affaires est observée sur la quasi-totalité des acteurs (- 8,4 % au total), en raison de la mise en place de FRPS (qui sortent en partie du cadre de Solvabilité 2), de l’instabilité économique et de la concurrence d’autres supports.

Le panel d’acteurs présente un portefeuille de placements de 1.411 milliards d’euros à fin 2022, en baisse de 16% sur un an.

*rapport sur la solvabilité et la situation financière (RSSF, SFCR en anglais) des assureurs