
La responsabilité de l’assureur retenue au titre du conseil
Depuis le 1er octobre 2013, les organismes d’assurance ainsi que les intermédiaires doivent, conformément à la recommandation de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) de janvier 2013 (1), s’assurer que le conseil fourni au client est certes adapté au profil de ce dernier, mais surtout qu’il le demeure tout au long de la durée de vie du contrat.
Cette obligation a été largement contestée par le secteur au motif qu’aucune disposition du Code des assurances n’impose à l’assureur de mettre à jour les éléments de connaissance du client, au point que le régulateur a revu sa copie pour une rédaction quelque peu sibylline : les professionnels doivent actualiser, « en tant que de besoin », les informations recueillies antérieurement afin que le conseil fourni soit adapté au profil du client à l’occasion d’un nouveau versement, d’un rachat partiel ou d’un arbitrage entre supports « lorsque ces opérations sont susceptibles d’entraîner une modification significative du contrat d’assurance vie ». Pour mémoire, le projet de recommandation envisageait de revoir le profil du client à la suite d’une modification de la situation familiale, patrimoniale ou professionnelle ainsi qu’à l’occasion d’une modification significative de l’environnement économique ou législatif.
Une première jurisprudentielle.
L’ACPR n’a pas encore rendu de décision de sanction sur ce sujet. En revanche, les juges n’auront pas eu besoin de s’appuyer sur cette recommandation pour consacrer une obligation de conseil tout au long de la vie du contrat, comme le craignaient les assureurs. « Il appartient au professionnel, tenu à une obligation d’information et de conseil, qui se perpétue au long de l’exécution d’un contrat, d’apporter la preuve qu’il a satisfait à cette obligation. »
Telle est l’affirmation de la Cour d’appel de Paris dans un arrêt du 6 octobre 2013 dans un litige opposant une veuve et sa fille à l’assureur de son défunt. En l’occurrence, la veuve reprochait à un agent général d’avoir manqué à son obligation de conseil et d’information en n’indiquant pas à son client, une fois marié à l’appelante, la possibilité de modifier la clause bénéficiaire de son contrat d’assurance vie souscrit en 1996 au profit du père.
Charge de la preuve.
La Cour d’appel précise que la preuve du respect de ces obligations ne peut être établie par la seule production d’une attestation de l’agent général par laquelle il reconnaît avoir informé son client de cette possibilité lors d’un versement complémentaire. Ce seul témoignage ne peut suffire dans la mesure où cette information a été délivrée oralement au client. Elle ajoute également que les arguments de l’assureur visant à montrer que le souscripteur était compétent en assurances et n’avait nullement besoin d’être conseillé et enfin n’avait pas l’intention d’assurer à sa femme et à sa fille une protection financière, sont inopérants.
En effet, le fait que le client soit directeur financier d’une concession automobile et suive les contrats d’assurance de l’entreprise ne permet pas d’établir une compétence particulière en assurance vie. Enfin, la veuve a apporté la preuve, par des attestations, de la volonté du défunt de protéger financièrement sa conjointe et sa fille.
(1) Recommandation n°2013-R-01 du 8 janvier 2013 sur le recueil des informations relatives à la connaissance du client dans le cadre du devoir de conseil en assurance vie.
CA Paris, n°12/00558 du 8 octobre 2013.