Neutralité carbone : la filière du bâtiment présente sa feuille de route

Gaetan Pierret
Les représentants du secteur ont remis au gouvernement leur plan d’action pour tenir l’objectif de 0 émission nette en 2050, comme l’impose l’article 301 de la loi Climat et Résilience.

Il y en avait du monde hier soir au Ministère de la transition écologique, boulevard Saint-Germain à Paris. Une bonne centaine de personnes avait été invitée à la restitution des feuilles de route des filières de l’automobile, des véhicules lourds, de l’aménagement urbain et du bâtiment, pour atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. L'article 301 de la loi Climat et Résilience enjoint en effet les secteurs les plus émetteurs de gaz à effet de serre d'identifier des leviers de décarbonation qu'ils sont prêts à activer pour atteindre les objectifs climatiques fixés par la France. «Le défi est grand mais atteignable», a assuré Anne Fraisse, directrice générale d’Urbain des bois et co-présidente de la feuille de route de la filière de l’aménagement. Si elle parlait pour son secteur, c’est en substance ce qu’ont affirmé chacun des porte-paroles des autres groupes de travail, notamment ceux du bâtiment, dont les enjeux sont importants.

En 2019, la filière du bâtiment a émis 153 Mt de CO², soit 25% de l’empreinte carbone de la France. Dans le détail, 33% provenaient de la production, les 67% émanant de l’exploitation des immeubles. L’objectif des professionnels est de réduire les émissions à 96 Mt d’ici 2030 et à 16 seulement en 2050.

Ils étaient plus de 500 à participer aux groupes de travail visant à élaborer leur feuille de retour. 25 propositions ont été retenues et proposées aux Ministres Christophe Béchu et Olivier Klein, réparties en cinq axes :

  • Réduction de l’impact de la production des composants
  • Améliorer l’empreinte carbone du neuf, qui pesait encore pour 26% de celle totale du bâtiment en 2019
  • Améliorer la performance de l’existant
  • Déployer des mesures transverses
  • Faire preuve de sobriété dans l’usage des bâtiments

Etienne Crépon a insisté sur ce dernier point. Le président du Centre Scientifique et Technique du Bâtiment (CSTB) était également co-rapporteur du groupe de travail de la feuille de route du secteur, avec Philippe Pelletier, président du Plan bâtiment durable. «On ne renouvellera pas en 30 ans l’intégralité du stock de 37 millions de logements que nous avons aujourd’hui. Pour autant, il est nécessaire de l’adapter à l’augmentation des températures. Bien que nous ne le connaissions pas totalement, le changement climatique est une réalité à prendre en compte dans les plans de rénovation», a appuyé Etienne Crépon.

Soulignant la mobilisation de gros acteurs sur le sujet comme la Caisse des Dépôts et Consignation ou bien encore Action Logement, les deux co-rapporteurs se sont dits « sereins » sur l’atteinte des objectifs de neutralité carbone. Ils ont toutefois relevé des freins que la filière doit encore lever, comme le besoin de formation, de main d’œuvre, de méthodes de calculs communes ou bien encore une plus juste répartition des travaux entre l’usine et le chantier, afin de rendre de rendre le programme de rénovation plus supportable par la filière.

«On ne touchera pas à l’ambition de la Zan»

A l’occasion de la restitution des feuilles de route des filières automobiles, transports lourds, aménagement et bâtiment, le ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires Christophe Béchu est revenu sur les critiques souvent adressées à l’objectif de Zéro artificialisation nette des sols (Zan). «Certains font comme si la Zan était devenue la clé de tous les problèmes, même de la crise du logement. Je veux leur dire qu’on ne touchera pas à l’ambition de la trajectoire, qui n’est pas une option si on veut tenir l’objectif de neutralité carbone», a-t-il expliqué. Il est également revenu sur les propos de l’ancienne ministre du Logement, Emmanuelle Wargon, à l’encontre du modèle de maison individuelle : «Au cours des 10 dernières années nous avons artificialisé 240 000 hectares. La moitié a servi à construire des lotissements de 8 logements/hectares. Avec la Zan, nous voulons passer à 16 logements / hectares